mercredi 9 mars 2011

Les chiens au travail

Dimanche 6 mars sur France Inter, l'émission "Vivre avec les bêtes" par Fabienne Chauvière et Elisabeth de Fontenay était partiellement consacrée aux chiens de travail. A cette occasion, l'invité du jour était le Docteur Vétérinaire Dominique Grandjean, Professeur à l'Ecole Nationale Vétérinaire d'Alfort*. Son intervention, bien que trop courte, a été passionnante. Je vous propose de revenir sur quelques moments forts :

Chien de travail ou chien de service

Un des premiers éléments évoqués est l'appellation de ces chiens. La question du maintien du terme "travail" pose question dans notre société actuelle. Si le chien a été domestiqué et éduqué pour travailler pour l'homme autrefois, la situation actuelle est différente. Les chiens sont aujourd'hui considérés comme des partenaires dans l'activité, au service de l'homme plutôt qu'asservis au travail.
De plus, la prise en compte du bien-être de l'animal est devenu un paramètre essentiel tant dans ses conditions de travail mais aussi de vie en général (ex : nourriture, habitat). D. Grandjean balaye également l'idée populaire - erronée - que les chiens de service vivent moins longtemps que leurs conspécifiques dédiés uniquement à la compagnie. En effet, plusieurs études scientifiques semblent avoir montré que les chiens de traineaux notamment, ont une espérance de vie supérieure à des chiens vivant seuls en grande partie (en journée, les maitres sont absents pour cause professionnelle), ce qui représente une source de stress non négligeable pour ces animaux sociaux. 

Source : http://www.satzdog.com
 
La diversité des activités du chien de service

Le chien assiste l'homme dans de nombreuses activités. On retrouve les activités dites classiques comme les chiens secouristes, les chiens d'avalanche, les chiens guide d'aveugle ou encore les chiens de garde. Aujourd'hui, la gamme de service s'étend et le chien prend des fonctions pour les moins originales, notamment grâce à son odorat développé : aide au diagnostic médical (détection de cancer, de diabète...), soutien à l'environnement et à la conservation (détection de plantes rares).
La question de l'appariement entre race et fonction a été soulevée. D. Grandjean précise bien que toutes les races peuvent être utiles à l'homme mais que bien souvent, c'est la culture qui façonne ce choix. Mais les choses évoluent comme l'illustrent les nouvelles pratiques des douaniers français qui privilégient les Yorkshires pour détecter la drogue dans les aéroports par exemple. 

Éduquer ou dresser?

L'échange s'est aussi poursuivi par cette question de l'éducation ou du dressage de l'animal. Une simple recherche dans un dictionnaire - comme le Grand Robert dans mon cas - montre à quel point il est nécessaire de différencier les deux approches. Dresser signifie "rendre soumis, habituer un être vivant à faire docilement et régulièrement quelque chose" alors qu'éduquer se définit comme "diriger le développement, la formation d'un individu par l'éducation". Dans cette interview, D. Grandjean a clairement affirmé sa préférence pour le terme "éduquer" - position que j'adopte moi aussi. En effet, l'apprentissage d'un animal de compagnie, à l'instar du chien, doit être perçu comme un moment agréable pour les deux partenaires. C'est pourquoi, les renforcements positifs doivent être privilégiés, qu'ils soient de l'ordre du jeu ou de la nourriture. D'ailleurs, le choix du type de récompense dépend aussi de l'apprentissage mis en œuvre. Pour un animal qui recherche de la nourriture (ex : truffe), il est conseiller de pas utiliser le renforcement par la nourriture car le chien aura tendance à manger ce qu'il cherche quand il l'aura trouvé!
Le processus d'apprentissage peut être plus ou moins long, selon la tâche / les tâches qui seront demandées au chien. Ainsi, pour les chiens recherchant des êtres humains (avalanche, séisme), l'apprentissage prend, en moyenne, 2 ans. Ce temps correspond à la constitution de ce que D. Grandjean appelle "la bibliothèque d'odeurs". Ce délai est nécessaire car le chien doit intégrer de nombreux paramètres. Outre le fait que l'odeur humaine est très complexe (chaque être humain peut être identifié grâce à un "code barre" odorant), un même homme peut voir son odeur évoluer selon son âge ou son état de stress par exemple. Même si le chien est opérationnel après un apprentissage "de base", "sa bibliothèque d'odeurs" s'agrandit et se complexifie à mesure qu'il vieillit, au fil de ses expériences. Mais, en règle générale, D. Grandjean précise que le temps moyen d'un apprentissage est de 18 mois.
 
L'homme et le chien : un couple indissociable

Dans une situation de service, le couple homme-chien est essentiel. C'est cette relation et cette excellente connaissance l'un de l'autre qui permet la meilleure efficacité à la tâche demandée. Dissocier le binôme revient à recommencer un apprentissage, la mise en place de nouveaux repères... Même si le chien peut réaliser ce qu'on lui demande en dehors de la présence de son partenaire humain, son efficacité sera moindre.
La journaliste a aussi interrogé D. Grandjean sur la motivation du chien à assister l'homme dans les tâches qui lui sont confiées. Il propose deux réponses qui me semblent justes. Tout d'abord, le chien prend intrinsèquement plaisir à faire plaisir à son partenaire humain. De plus, la tâche accomplie, le chien est récompensé - processus qui encourage à poursuivre ainsi. 

Quelques conseils?

C'est sur cette question que c'est terminée l'interview. D. Grandjean donne une simple réponse : Exercice & Compagnie ! Donner un peu de temps à votre chien pour de la balade, du jeu, des caresses chaque jour et des conditions de vie en adéquation avec ses besoins. Votre chien a les bonnes bases pour être un chien heureux!











A l'issue de cette émission, je ne peux m'empêcher de faire le parallèle avec les chiens des AAA (activités associant l'animal). Nous ne devons pas oublier:
- que nos chiens nous assistent de leur plein gré et ne doivent être contraint à la tâche
- que c'est le couple homme-chien qui est important et non l'homme seul ou le chien seul. Ainsi, même si l'homme est expérimenté dans les AAA, il devra passer par une nouvelle phase d'apprentissage avec chaque nouveau chien, ce qui lui permettra de construire une relation solide et positive, essentielle au bon déroulement des AAA.
- que la race des chiens d'AAA n'est pas prédéterminée. Ce qu'il faut, c'est avant tout un chien qui sache supporter un certain stress et surtout avec qui une relation de confiance est construite.

La discussion est ouverte...


*Pour en savoir plus, Dominique Grandjean tient un blog...

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